à chaud

"Chez le gynéco ? Vraiment ?"

« Une pub géante »

Gaïa : 

Comment faire un film politique, féministe si possible, tout en étant un blockbuster sponsorisé par un marchand de poupées stéréotypées en baisse de chiffre d’affaire qui doit, entre autres, se refaire une image auprès du public ? Greta Gerwig n’a pas la réponse. 

L’ambition était grande et l’intention louable, de faire un film qui propose de rappeler l’importance du combat féministe en ces temps de montée des obscurantismes aux quatre coins de la planète. Hélas, la question du financement se posant, le projet s’effondre et accouche d’un film accessoire, finalement symptomatique de ce qu’il voulait dénoncer. 

Barbie est un condensé de clichés, une coquille vide enrobée d’un féminisme réactionnaire et commercial. 

Le film agglutine les pseudos-dénonciations autour d’une absence de scénario. 

Tantôt moqueur, tantôt flatteur, on en ressort sans trop savoir si le film hait les hommes ou bien les femmes, ou bien les deux, ou bien simplement les chômeurs.  

En effet, l’unique once de féminisme que l’on pourrait trouver à la séquence est doublement réductrice. 

Primo, si dans le monde “idéal” de Barbieland, les femmes dominent pleinement le monde, c’est grâce à leur capacité à travailler.

Secundo, elles peuvent travailler et être ainsi admises dans cette “utopie” uniquement si elles sont en talons hauts et tirées à quatre épingles. Une vision assez insupportable qui culmine en une fabuleuse démonstration du pouvoir de séduction féminin, vraisemblablement unique autre compétence de la moitié de la planète ici représentée . Entre féminisme néo-libéral, conditionné par les facultés productives et représentation austère de la femme comme un morceau de viande assez cérébré pour savoir se vendre auprès des hommes, la vision de la femme portée à l’écran est pour le moins décévante..  

Pour couronner le tout, on notera la fin littéralement incompréhensible. Barbie stéréotypée, ayant eu accès au vrai monde, se voit prise d’une folle envie de faire un tour chez le gynéco (oui, vraiment), la production nous glissant subtilement que ce qui détermine un individu dans le monde réel est avant tout son sexe (ou son orientation sexuelle, puisque c’est la seule chose qui détermine Allan, Le Gay…), réjouissant. 

Aussi insultant qu’il soit pour les deux “côtés”, le film parvient à nous extorquer un ou deux (deux, soyons généreusement honnêtes) rictus, transperçant l’affligeante banalité des dialogues. 

On ne commentera pas la réalisation du film, puisque inexistante, l’ensemble du budget semble être passé dans la promotion des bagnoles, qui font aussi partie du kit de l’émancipation selon Mattel. 

Relativisons, pouvait-on sincèrement en attendre plus d’un film hollywoodien, nécessairement ancré dans le même modèle capitaliste qui a permis à Mattel de commercialiser une poupée blonde platine, à la plastique irréelle, avec pour slogan “tu peux être ce que tu veux” ? 

Accordons à Greta Gerwig le sens de la mise en scène, en avouant le côté jubilatoire et amusant de cette abondance de rose et d’artifice (bien que vite barbant). Notons la tentative de faire un film relevant a priori du “female-gaze”, autant d’arguments qui ont pu être avancés pour le défendre. 

Néanmoins, doit-on vraiment accorder “grand public”  binarité critique attristante qui donne  la stérile “lutte des sexes” pour unique représentation des relations hommes-femmes ? Le cinéma hollywoodien peut-il quant à lui se targuer d’être subversif, lorsque l’on constate que, par sa mécanique et son objectif capitaliste, toute dimension politique d’une œuvre sera en son sein corrompue et ainsi diluée pour la rendre mieux vendable ? 

Encore une fois, le divertissement est là, mais seulement le divertissement, et le fait d’affirmer que le film véhicule un message militant est une attristante manifestation de la crédulité des foules face au cynisme marchand, plus que s’il s’agissait simplement d’un blockbuster pas dingue.

TESS : 

C’est en 50 nuances de rose ( étonnant ) que le tant attendu Barbie arrive sur grand écran. 

Un souffle hollywoodien et une énergie débordante  affluent dès le départ  (des décors ultra plastiques et costumes kitchs à la bande originale qui a dû coûter bonbon ). 

La pêche de Margot Robbie et de Ryan Gosling porte le film avec des grands sourires et des chorées catchy. 

Le propos féministe du film n’est pas si profond et apparaît aussi plastique que ses décors. Porté par une histoire enfantine, il semble nous dire que bien qu’en élargissant le nombre de cases, les femmes se voient systématiquement assigner une étiquette. Si l’on refuse de se soumettre à être “ Barbie Bizarre”, ou encore “Barbie Metteuse en Scène”, que sommes-nous ? La liberté des femmes, accompagnée de cette impression de sans cesse devoir se définir, n’en paraît que plus restreinte et destinée à se plier aux codes ( aussi nombreux et inclusifs soient-ils ). 

Alors, un film est-il forcément mauvais s’ il ne parvient à pousser une réflexion plus loin que la simple caricature du patriarcat ? Par forcément. Barbie est une comédie, qui s’efforce de nous faire rire et qui y parvient à quelques reprises. Le rôle de Ken sied parfaitement à Ryan Gosling et la scène de danse ( tout en gel et virilité ) ne manque pas de rappeler la mythique scène de Grease, “Speed Lightning”, symbole des stéréotypes masculins du XXème siècle. Barbie est cependant moins un bijou du cinéma qu’une publicité géante : entre Mattel et Birkenstock, qui ,à votre avis, a touché le pactol  ? 

Une comédie sympa  ni assez subtile, ni assez nuancée pour satisfaire entièrement. 

Barbie Critique vous laisse ici, et s’en va voir le Parrain, qui selon tous les hommes de cette planète, est le meilleur film de l’histoire.