Pour sa mise en scène acide et vibrante
Aronofsky nous initie à son sens de la mise en scène dans Requiem for a dream. Il conjuguera dix ans plus tard sa maîtrise de la mise en scène dans Black Swan, unanimement reconnu comme l’un des meilleurs drames psychologiques de son temps.
Le réalisateur sait allier fond et forme et projette la tourmente de ses personnages à l’écran. La distorsion récurrente des images et variations de plans toujours plus déstabilisants apportent au film le souffle extatique qui transcende la léthargie des protagonistes.
Le choix du grain apporté au traitement des images vient vernir le film de la même saleté que la tournure que prend le film.
Les scènes de prises agissent comme le métronome de ce long métrage, de plus en plus rapprochées, les scènes se succèdent entrecoupées d’aiguilles et d’aluminium pour une ambiance TP de chimie, mais trash.
Pour sa dose de descente aux enfers
On regarde passivement les trois protagonistes sombrer dans de profondes abîmes. L’usage abusif des substances, qui semble au départ projeter les personnages vers un futur charmant, ne laisse à la fin de place que pour une douleur acerbe. C’est une gangrène allant au-delà de la souffrance physique qui se diffuse dans les veines de Marion, Sara et Harry. Bien loin sont les rêves et les projets d’avenir dans les affreux plans entrecoupés de la scène finale, signant avec horreur la servitude à l’illusion du paradis.
La division du film en sous-chapitres fait monter la mayonnaise dans la dégringolade tragique des destins de nos trois personnages, ajoutant son effet dramatique à la mise en scène choc d’Aronofsky.
Pour son regard impitoyable sur les sociétés
Requiem For a dream, c’est aussi réfléchir sur ce l’état de notre ère, qui fait si facilement succomber aux drogues. Aronofsky n’épargne ni les jeunes, ni les vieux : c’est toute la société qui passe sous sa caméra.
Une Société perverse, où l’abîme de l’ennui conduit nos protagonistes vers les profondeurs pour fuir la vacuité de leur existence. C’est le rendez vous des grands mères dans l’espace de commérage qu’est le pas d’une porte et la télé qui rythment le temps restant, c’est la fulgurance des projets et la consommation qui masque un amour dysfonctionnel entre Harry et Marion.
Une société maligne également, insidieuse, qui ne semble laisser qu’un seul choix à l’individu, celui de se torturer lui-même, pour atteindre la reconnaissance éphémère, le temps d’un plateau au prix de sa propre vitalité. Le culte du corps, l’obsession de l’écran, la dictature de la caméra, autant de vices sociaux qui poussent Sara à l’autodestruction, sous le regard malin du présentateur, dans un jeu d’inversement des rôles troublant. Dans requiem for a dream, Nous sommes du côté des groupies de jeux télévisés qui rêvent d’un succès virtuel, Nous sommes cette jeunesse pleine d’ambition qui n’a de moyen que la délinquance pour entrer dans la danse, nous sommes la jeune fille qui se rêve artiste et finit Cendrillon tard dans la nuit, au plaisir des marchands de bonheur. Requiem for a dream, c’est comment la société exploite, abîme, et éteint nos rêves.